Pour un joli poupon rose commandé, une demi-tonne de questions vous vous poserez. Fille ou garçon? Quel sera son nom? Quand dormira-t-il toute la nuit? Comment lui faire manger du brocoli? L’une d’entre elles restera à jamais insoluble: où acheter des heures supplémentaires afin de tout faire?
Faute de trouver le commerçant du temps, j’ai dû me contenter des vendeurs de conseils.
Comme la demande n’est pas grande, ils les distribuent gratuitement jusqu’à saturation. Comment concilier sa vie conjugale, familiale, sociale, professionnelle et personnelle? Comment demeurer fidèle à ses valeurs et priorités d’avant, tout en devenant la meilleure des mamans? Et surtout, comment conjuguer tous ces impératifs dans un présent, même imparfait, sans être écartelée par le passé, le futur, le conditionnel et l’impossible?
Élaguer son existence de l’inutile. Voilà le secret que j’ai retenu de mes lectures.
J’ai récité cette phrase telle une formule magique. J’en ai fait mon dogme et mon slogan. Élaguer mon existence de l’inutile devait résoudre tous mes soucis et régler mes conflits intérieurs.
Ne restait plus qu’à me demander: qu’y a-t-il de facultatif dans ma vie? Quelles inutilités meublent mon temps? Un petit ménage s’imposait dans mon emploi du temps.
La maternité est le rôle le plus important de notre vie
Ça va de soi. Nous sommes en grande partie responsables du développement et de l’avenir de nos tout-petits; et ça débute avant même que la cigogne ait livré le colis. Il faut lire et s’informer, suivre des cours prénataux et des yoga-aqua-cardio-bedaine, souffrir naturellement et sans médicament. Ensuite, il suffit d’être patiente, douce, ludique, compréhensive et disponible. Ne pas laisser pleurer bébé. Vaut mieux faire cramer le rôti, provoquer un incendie si ça devient inévitable, mais ne pas abandonner sa progéniture alors qu’elle te hurle à tue-tête son besoin de toi. Le cododo est primordial même si cela implique des bleus partout et des nuits blanches. Puis, bébé grandit. Il dort et mange seul, mais tu dois l’amener au parc, à la fête du petit Hector (parce que SA vie sociale est prioritaire), à l’atelier d’art (pour exprimer son Picasso intérieur), à l’aréna (si jamais il y avait de la graine de Maurice Richard ou de Tessa Virtue, faut bien commencer par la base), au cours de natation (pour qu’il sache se débrouiller si jamais il venait qu’à tomber dans la piscine du voisin, même s’il n’y a aucun danger parce que ton petit ne sort jamais sans être accompagné d’un adulte, d’un casque et d’une bouée – et que le voisin n’a pas de piscine parce que t’habites en ville).
L’important c’est la santé!
Il demeure donc naturel, voire essentiel, de consacrer un temps fou à l’alimentation des siens. Leur apprendre à cuisiner devient un must, même si ça requiert de multiplier le temps de préparation par le nombre de bambins. Tout préparer maison. Et quoiqu’en dise la charmante nutritionniste de la télé, faire manger huit légumes par jour aux gamins, ce n’est pas de la tarte. Ça demande beaucoup d’imagination et de dissimulation.
Laissons une terre propre à nos enfants
La survie de notre espèce en dépend. Et pouvons-nous être trop occupés pour soigner notre planète, l’avenir de nos bambins? Assurément pas. Alors, chers parents, lavez des couches et étendez-les un peu partout dans votre 4 1/2, reprisez les vêtements de bébé de 2006 déjà porté par les huit cousins et cousines, achetez seulement en vrac même si le plus proche magasin de vrac se trouve dans la ville voisine (mais n’y allez surtout pas en voiture). Récupérer, recycler, laver, économiser et repriser vous garantissent le paradis terrestre (ou presque) jusqu’à la fin de leurs jours.
So-so-solidarité
Les parents doivent s’impliquer; à la garderie, à l’école, mais aussi s’impliquer socialement, car l’entraide, l’empathie et le partage sont les plus belles valeurs à inculquer à nos enfants. Faire du bénévolat en famille peut-être?
Éduquer les autres pour mieux éduquer nos gamins
Ni les jouets ni les couleurs ne sont genrés. On ne vole pas les bisous aux bambins. Pas de câlin sans consentement. On n’achète pas de cochonneries à l’effigie de chaque endroit qu’on visite. Même chose pour toutes ces bébelles aussi éphémères qu’inutiles produites en Chine et vendues au magasin-où-plus-grand-chose-ne-coûte-un-dollar. Peu d’entre nous aiment jouer les Ayatollahs, mais… comment réduire les déchets chez soi s’il nous faut accepter les fameux sacs à surprises de Tante Chose? À Rome comme les Romains, je veux bien, mais quand Rome envahit ma maison ou la tête de ma puce, je fais quoi?
Mais surtout, il ne faut pas négliger sa vie personnelle, amoureuse, sociale et professionnelle.
Ne pas s’oublier. On doit d’abord s’occuper de soi avant de prendre soin des autres.
Bref, depuis huit ans, je valse avec le temps et m’étourdis dans la ronde des slogans. Et j’ai sur le cœur tous ces instants manqués, perdus ou envolés. Je culpabilise parfois de tout ce que je n’ai pas fait ou de tout ce que j’ai trop fait.
Et vous, quelle belle valeur avez-vous cachée dans le tiroir en attendant que l’horloge ralentisse? Pour quel manquement ressentez-vous le plus de culpabilité?
Mélissa M.